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Fanny Jacq
Mon Sherpa
Quel est votre projet ?
Mon projet est basé sur un objectif : faciliter l’accès aux soins en santé. Innover en santé mentale me paraissait également urgent afin de dépoussiérer cette spécialité !
J’ai tout d’abord fondé la société Doctopsy – rachetée début 2020 par la solution de téléconsultation Qare, dont je suis aujourd’hui directrice de la verticale santé mentale. Cette solution permet l’accès à des professionnels de santé mentale sur tout le territoire en consultation vidéo à distance. La volonté de développer cette solution est venue du constat du trop grand nombre de déserts médicaux psychiatriques en France et des délais d’attente extrêmement longs en cabinet.
J’ai ensuite développé une application : un « chatbot » en santé mentale, Mon Sherpa. Il s’agit d’un compagnon pour les personnes qui rencontrent des difficultés psychologiques. Là encore, la volonté de développer un tel outil est venue du constat de la difficulté d’accès à des ressources fiables : soit les personnes vont chercher directement des réponses sur internet (et cela peut parfois être dangereux), soit elles consultent, et peuvent attendre des semaines/mois. Mon Sherpa est une solution intermédiaire proposant des exercices simples à des personnes qui ne consultent pas, ou qui consultent mais se sentent seules entre deux rendez-vous.
Lorsqu’une personne la télécharge, elle est invitée à passer des questionnaires médicaux (sur la dépression, le sommeil, … ) et un questionnaire de personnalité. Après analyse des réponses, Mon Sherpa propose à l’utilisateur des activités adaptées à ses symptômes, parmi un catalogue de 180 exercices. Ceux-ci sont rédigés par des psychiatres et des psychologues, se basent sur la thérapie comportementale et cognitive, et l’application est supervisée par un conseil scientifique composé de psychiatres et chercheurs en sciences sociales.
Mon Sherpa recueille également des données en vie réelle de son utilisateur en lui envoyant régulièrement des notifications qui le questionnent sur ses émotions, son humeur, …. Cela permet au patient et à son praticien, s’il en a un, d’avoir des « photos objectives » de son état, jour après jour, et de mieux suivre son évolution.
Mon Sherpa, rendu gratuit depuis le confinement, a été téléchargé plus de 250 000 fois depuis fin 2019 et a gagné le prix du jury de l’Encéphale 2021. L’application était également dans le top 3 des meilleures applis de développement personnel du classement Google Play Award 2020.
Quels ont été les obstacles rencontrés pour monter le projet ?
Le premier obstacle, et je ne m’y attendais pas, a été celui de l’adoption des outils par mes confrères. Ils sont peu familiers du digital, il s’agit donc d’un vrai changement de paradigme pour eux. Ils ont parfois peur d’être « remplacés » par un outil numérique. C’est important de leur faire comprendre que la thérapie numérique est une sorte de psychothérapie augmentée, une aide complémentaire pour le patient comme pour le thérapeute. De plus, les études montrent que les patients ont une meilleure observance car ce type d’outil les accompagne et les aide dans leur suivi.
Par ailleurs, au début de mon projet en 2017, la santé mentale n’était pas encore mise en avant comme elle l’est aujourd’hui : il existait, et il en existe encore, de nombreux tabous autour de ce sujet. Un utilisateur peut donc, par crainte du regard des autres, ne pas oser utiliser ce type d’application.
Enfin il faut rassurer l’utilisateur sur la confidentialité, le respect, l’anonymat de ses données de santé.
Quels sont les enjeux actuels de la santé ?
C’est une période très excitante, car les enjeux qui touchent la santé aujourd’hui sont nombreux et variés.
Tout d’abord la digitalisation de la santé bien sûr ! Le virage numérique doit être pris - la France est d’ailleurs déjà en retard dans ce domaine - mais il doit être pris intelligemment, éthiquement, en respectant le patient, ses besoins et ses données de santé.
La question de l’éducation des professionnels de santé aux nouvelles pratiques et technologies.
La fluidité du parcours de soins d’un patient dans son ensemble, de la prévention à la détection de symptômes, puis au diagnostic et au traitement jusqu’enfin la détection de rechute. Chaque brique est pour le moment trop isolée, sans communication avec les autres, et cela nous fait perdre en efficacité et en temps (ex : le réseau ville/ hôpital manque encore de connexions).
Le vieillissement de la population: les maladies sont de plus en plus chroniques et les prises en charge de plus en plus longues et coûteuses, ce qui impacte et va impacter ces prochaines années le budget consacré à la santé. Comment optimiser les dépenses, en dépensant moins et mieux ?
L’accès à la santé : il reste inégalitaire selon les conditions socio-économiques du patient. Lisser cette inégalité est aujourd’hui une priorité. Les études démontrent encore qu’actuellement, le risque d’avoir un cancer est plus grand si les conditions socioéconomiques du patient sont mauvaises. Et le risque d’en mourir est également plus grand que pour une personne aisée financièrement.
La responsabilisation du patient me semble également importante, le rendre acteur de sa santé, lui faire comprendre les enjeux, briser cette barrière hiérarchique entre le patient et son médecin.
Enfin il existe un enjeu autour des risques pandémiques. La crise que nous traversons le confirme, et il est probable que d’autres vont suivre. Comment s’y préparer au mieux et s’adapter ?
Et dans 10 ans, comment voyez-vous la santé ?
J’imagine une prise en charge plus globale et homogène des patients, et beaucoup plus égalitaire, avec le même accès aux soins pour tous, et les mêmes chances de guérir face à une maladie.
Je crois aussi qu’avec les progrès conjugués de la science et de l’intelligence artificielle, nous allons tendre vers une “médecine des 4P” : plus personnalisée, pour des traitements mieux supportés par les patients ; moins curative et plus préventive voire même prédictive, grâce aux progrès de la génomique. Enfin, j’exprime le vœu d’une médecine plus participative, dans laquelle médecin et patient sont deux partenaires tendus vers le même objectif.
J’espère que l’on parlera santé mentale dès le plus jeune âge, que des actions de sensibilisation seront menées dès l’école sur l’importance de prendre soin de sa santé psychologique, et que des consultations gratuites de bilan avec des psychologues seront systématisées à l’adolescence, comme c’est le cas aujourd’hui pour le dentiste !