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Cécile Reboul
Skin
Quel est votre projet ?
Mon projet est de mettre l’art au service de la santé afin de favoriser la résilience des malades du cancer. J ‘ai créé l’association Skin en 2012 pour permettre aux femmes touchées par le cancer de rebondir après les traitements, période d’isolement, d’angoisse et de profond désarroi. Cette nécessité d’accompagner les personnes atteintes du cancer est mise en lumière par l’Observatoire sociétal des cancers : pour 2 patients sur 3, la phase la plus difficile demeure « l’après », cette période laissée dans l’invisible… Il apparaît fondamental de rassurer et d’accompagner ces femmes dans leur processus de reconstruction. Dans le cancer, il y a un « avant » et un « après ». Après son cancer, la femme n’est plus jamais la même. Reconquérir sa féminité, recouvrer son intégrité et habiter cette nouvelle peau demande du temps et de l’aide. Notons également que nous sommes de plus en plus nombreux à vivre avec un cancer, et de plus en plus longtemps compte tenu de l’évolution des traitements. Je pense ici aux cancers métastatiques. Il y a donc « l’après » pour certaines et le « pendant après » pour d’autres. Préparer cet « après » avec le soutien de Skin, c’est faire le pari d’une mue réussie.
Skin propose donc des défis artistiques à des binômes femmes – artistes, soit autant d’expériences de dépassement et de recréation de soi. Skin restitue ces œuvres et performances dans des lieux prestigieux, avant de les exposer sous forme photographique dans des hôpitaux, et tout autre structure qui le souhaite, en France, en Belgique et même au Québec.
Skin organise aussi des sorties culturelles, des ateliers de groupe sportifs et créatifs, des challenges ludiques, tout au long de l’année pour ces patientes et ex-patientes.
Depuis le mois de janvier 2020, le projet Skin est officiellement accessible aux hommes, souvent plus réticents lorsqu’il s’agit d’exprimer leurs émotions. Nous accueillons trois hommes cette année !
Le projet Skin permet aux personnes touchées par le cancer de :
SE RECONSTRUIRE.
Cesser d’avoir peur. S’inscrire dans le présent et se projeter. En participant à la création d’une œuvre ou d’une performance, la Personne se redessine un avenir et s’engage du côté de la vie.
TEMOIGNER.
Témoigner, à travers une création ou une performance. Sublimer ce qui fait mal, ce qui libère, ce qui guérit : de l’ablation à la reconstruction, de la désintégration à la reconquête de soi. En témoignant par le biais de la création, de la performance, la Personne s’inscrit dans le visible.
PARTAGER.
Avec les autres personnes atteintes dans leur chair. Avec les siens. Avec tous. En partageant sa création, sa performance, son histoire, la Personne fait tomber les tabous sur le cancer et sensibilise le public à ses enjeux.
Quels ont été les obstacles rencontrés pour monter le projet ?
Au début de l’aventure, le plus compliqué a été de créer un réseau – un réseau d’artistes notamment ; mais aussi de convaincre des partenaires qui comprennent les enjeux de santé publique liés à l’après cancer. Dans une société qui nous somme d’aller toujours bien et d’être performants, comment convaincre ces partenaires qu’en matière de santé, comme dans tout autre forme de traumatisme, on ne peut pas faire l’économie du temps. Que nous sommes liés au temps du vivant, de la nature, des saisons…
Le cancer continue à faire peur. On accompagne volontiers le malade pendant la période dite « des soins ». Mais après on n’a plus envie d’en entendre parler et on veut se convaincre que tout redevient comme avant. C’est un leurre. Quand j’ai créé Skin, certains ne comprenaient pas. Depuis octobre 2018 les lignes bougent enfin. Et encore, aujourd’hui on parle beaucoup de retour au travail après le cancer. On oublie de dire qu’avant de retourner aux autres, il convient d’abord de retourner à soi ! On ne peut pas se projeter en société, encore moins dans le milieu du travail, si on n’est pas d’abord intimement réparé.
Quels sont les enjeux actuels de la santé ?
Le premier enjeu dans la santé telle que nous la connaissons aujourd’hui est bien sûr l’amélioration de la prise en charge des patients pour lutter contre la maladie. L’innovation digitale répond en grande partie et de manière exponentielle à cet enjeu qui ouvre de nouvelles perspectives dans la prise en charge des patients – je pense notamment aux travaux menés sur notre ADN, sur nos cellules… Les thérapies évoluent, notamment en matière de lutte contre le cancer.
Le deuxième enjeu, qui découle logiquement du premier, est de pouvoir faire face à cette évolution digitale tout en conservant l’humanité liée au soin. La compassion est un enjeu fondamental de la santé aujourd’hui. De même que le temps partagé avec le patient. L’écoute, le toucher, la compréhension, les mots choisis pour expliquer et rassurer demeurent selon moi les vertus cardinales. Nos soignants méritent également d’être revalorisés. Ils doivent être écoutés, rassurés, gratifiés et soignés au même titre que tout un chacun. De leur bonne santé dépend la nôtre.
Le troisième enjeu est le temps imparti pour pouvoir accéder aux nouvelles thérapies.
Par ailleurs, comme je le soulignais plus haut, le cancer comme d’autres maladies est une maladie chronique et nombreux sont les patients à vivre longtemps avec leur maladie du fait des innovations thérapeutiques. Il en résulte de nouveaux écueils de santé, une appréhension plus élargie du patient, au-delà des seules thérapies médicales. Je pense ici à l’accompagnement des patients dans leur parcours de soins, de la prise en compte globale du patient pendant et après sa maladie. Ainsi, les « soins de support », généralement administrés pendant les traitements, devraient être poursuivis longtemps après. Le patient est une entité vivante, donc mouvante et complexe. Une association de patients comme Skin, ou comme d’autres, devient indissociable de ce parcours de soins en parallèle de la médecine classique.
Et dans 10 ans, vous voyez ça comment ?
La santé évolue avec l’âge de la population. La population française vieillissant, les parcours de soins s’adapteront à leurs besoins, de même qu’ils suivront le fameux virage ambulatoire. La santé évoluera aussi avec la personnalisation des traitements, avec leur prédiction et bien sûr avec la participation incontournable des patients.
Je reste optimiste, la santé portera en grande partie sur la prévention et donc prendra en compte le patient dans sa globalité, dans ses dimensions à la fois physique, psychique, mentale, sociale, culturelle. Demain sera, je l’espère, un retour aux sources (cf. Hippocrate « Mon premier souci sera de rétablir, de préserver ou de promouvoir la santé dans tous ses éléments, physiques et mentaux, individuels et sociaux. »). La santé s’envisagera comme un tout, un état complet de bien-être, qu’on « tombe » malade ou pas. J’ose croire que les avancées technologiques laisseront plus de temps à la rencontre (avec un grand R) entre un soignant et un patient et que les politiques de santé favoriseront aussi l’épanouissement de nos soignants.