« Depuis l’enfance, la médecine m’a toujours passionnée. Plus tard, mes intérêts se sont développés vers le monde des affaires. J’ai pu réconcilier ces deux pôles en choisissant une carrière en finance internationale dans l’industrie de la santé. Après près de 15 ans dans des postes financiers à l’international pour de grands groupes pharmaceutiques, et un Executive MBA à l’EM Lyon, je me suis lancée avec bonheur et énergie dans l’entreprenariat. La rencontre avec Elodie et Thierry à l’initiative du concept a été décisive. Le projet de pouvoir venir en aide aux enfants atteints d’asthme grâce à des robots connectés m’a enthousiasmée. Et l’aventure LUDOCARE a commencé. »

Quelle est votre initiative de santé ?

Ludocare développe et conçoit des thérapies digitales dédiées aux jeunes enfants atteints de maladie chronique avec des traitements lourds et contraignants au quotidien.

Notre première solution, JOE, s’adresse aux enfants souffrant d’asthme.

Pourquoi l’asthme ? Car l’asthme est la maladie chronique #1 de l’enfance. Il s’agit de la pathologie la plus fréquente, elle touche plus de 10% des enfants dans le monde. Les traitements médicamenteux pour bien gérer cette pathologie existent, sont efficaces mais sont lourds, contraignants et pas toujours simple à utiliser, on parle d’un arsenal thérapeutique complexe. Cette complexité engendre une très faible prise des traitements et des difficultés à les suivre : on parle de mauvaise observance. Cette faible observance et ces nombreux mé-usages influent sur le mauvais contrôle de la maladie, engendrent des crises, des exacerbations et des hospitalisations à répétition, mais aussi de l’angoisse et du stress pour les parents. Cette maladie est un fardeau porté par toute la famille.

C’est pour cette raison que nous avons décidé de créer JOE un compagnon de santé connecté ludique et interactif qui a pour objectif d’aider les enfants à devenir autonomes dans la bonne prise de leur traitement tout en les motivant de façon ludique et interactive.

Joe est le compagnon personnalisé qui s’adapte aux traitements et aux envies de chaque enfant.

Il est paramétré à distance par les parents grâce à une application mobile dédiée qui référence l’ensemble des médicaments français, tous leurs modes de prises et s’adapte aux soins spécifiques de chaque enfant. La personnalisation est complète et adaptée à chaque enfant.

Une fois paramétré, au moment des prises, le robot sonne et appelle l’enfant. Il parle, le guide pas à pas, énonce les médicaments, la posologie et indique les bons gestes à faire. Il prend ses médicaments « avec l’enfant ».

A la fin des prises le compagnon motive l’enfant en débloquant des récompenses quotidiennes et personnalisées.

Les parents reçoivent de leur côté des notifications sur leur smartphone. Les informations liées aux traitements et à l’observance sont transcrites dans un rapport mensuel édité automatiquement dans leur application.

Ils sont ainsi rassurés et peuvent échanger avec leur médecin sur des informations fiables et automatisées, sans biais de mémoire.

Ludocare c’est l’alliance de l’innovation et du ludique au service du soin pour améliorer la santé des enfants et leur qualité de vie à long terme.

Quels ont été les obstacles rencontrés pour monter le projet ?

Dans l’entrepreneuriat, les obstacles sont nombreux mais le nerf de la guerre c’est le financement ! Si je devais évoquer une grande difficulté c’est bien de la levée de fonds dont je parlerais. Nous avons une mission ambitieuse : faire en sorte que tous les enfants souffrant d’asthme persistant dans le monde puissent un jour bénéficier de notre service pour les accompagner dans la bonne prise de leurs traitements et améliorer leurs conditions de vie.

Pour cela, il faut une stratégie elle aussi ambitieuse et les moyens pour la réaliser. Le pilier de notre approche est la réalisation d’une étude clinique dans plusieurs centres en France pour obtenir des preuves médico économiques et cliniques nécessaires à la négociation d'une prise en charge financière.

Ce projet nécessite des fonds importants et donc des investisseurs. Le parcours de la levée de fonds de Ludocare a été long et compliqué car pour les financiers « la pédiatrie est un petit marché ». Il faut allier technologie et performances économiques / opportunité de croissance… mais résilience et persévérance nous ont permis de rassembler les meilleurs acteurs à nos côtés pour nous soutenir et nous déployer. Un grand merci à Karista, BPI Patient Autonome, BPI FTS et INCO de croire en notre cause et notre équipe.

Quels sont les enjeux actuels de la santé ?

Pour moi les enjeux actuels de la santé se situent encore beaucoup dans le changement de paradigme qui doit nous emmener d’une médecine curative vers une médecine préventive.  

En effet nous sommes tous conscients de l’importance de la prévention. Qu’elle soit primaire, c’est-à-dire en amont de la maladie pour faire en sorte que les gens vivent en bonne santé le plus longtemps possible, ou bien secondaire c’est-à-dire diagnostiquer plus tôt pour traiter plus vite, mais aussi tertiaire en agissant pour améliorer le contrôle et limiter la dégradation de l’état de santé. La prévention est essentielle si nous souhaitons une population en bonne santé et une économie viable. Aujourd’hui, ces concepts sont connus mais, dans la pratique, pas encore assez répandus. De plus d’un point de vue économique les solutions qui permettent d’agir sur ces leviers sont encore trop peu financées. Or nous savons que pour qu’une innovation atteigne le « standard of care », comme on le dit dans notre jargon, il faut qu’elle soit prescrite et prise en charge …. Mon enjeu est donc d’arriver à sensibiliser et mobiliser les payeurs pour financer les solutions de prévention.

Un enjeu additionnel est le domaine de pédiatrie qui est aujourd’hui sous doté et ceci à plusieurs égards. Nous l’avons vu encore cet hiver avec l’épisode de bronchiolite et la crise que les soignants ont traversée. La pédiatrie est trop peu considérée, la charge repose entièrement sur les parents qui se retrouvent souvent démunis. Tous ceux qui sont parents le savent, il est bien plus difficile de faire face à la maladie de son enfant qu’à la sienne… les charges mentale et émotionnelle sont considérables et systématiquement sous-évaluées pour ne pas dire souvent complètement occultées. Ils ont besoin de soutien.

Je terminerais en disant qu’il faut s’occuper de la santé de nos enfants aujourd’hui pour avoir des patients adultes demain en meilleure santé, et que ceci passera par l’éducation et l’accompagnement des enfants dès leur plus jeune âge.

Et dans 10 ans, comment voyez-vous la santé ?

Dans 10 ans je vois la santé plus préventive, plus personnalisée, plus inclusive et réellement participative dans laquelle le patient (quel que soit son âge) mais aussi leurs aidants aient une place prépondérante. Une médecine tournée vers la pédiatrie avec des solutions adaptées et qui permettent d’engager et d’accompagner l’enfant.

Les traitements médicamenteux sont essentiels mais pas suffisants. La compréhension et la prise en compte de l’environnement personnel ainsi que l’adhésion des patients et des accompagnants sont essentiels pour un traitement efficient et une meilleure qualité.

Je suis confiante dans le fait que cet avenir est à nos portes et notamment parce que les choses bougent et que les acteurs allient leurs forces pour apporter ensemble du soutien et de la valeur augmentée aux patients et à leur famille.

Spéciale dédicace à Claire Portefaix et au groupe Viatris notre partenaire engagé dans la diffusion de notre service auprès des professionnels de santé. Pour être complète il ne nous manque plus qu’à être rejoint par un organisme complémentaire pour une prise en charge du service. A bon entendeur ….